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Madoukera au fil des vagues...
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5 mai 2014

Haiti, Ile à Vache

2014Entre Santiago de Cuba et l'île à Vache à Haïti, nous avons devant nous une étape de près de 200 miles, donc environ 36 heures de navigation. Aussi nous essayons de partir de bonne heure, mais c'est sans compter sur la lenteur administrative. Ce n'est donc qu'à 9h que nous pouvons larguer les amarres ce dimanche 4 mai 2014, juste après la sortie d'un cargo et avant l'entrée d'un autre (un cargo occupant à lui seul toute la largeur de la passe d'entrée). On m'avait prédit que nous ne pourrions partir qu'à 10h, mais soit parce que c'est dimanche, soit parce que j'ai donné un Rapala au premier garde monté à bord, soit parce que j'arborai un tee-shirt à l'effigie du Che, toujours est-il qu'on a pu éviter le défilement des 6 agents et du chien anti-drogue, alors que tous les autres bateaux y ont eu droit... on a fait des jaloux ! La traversée en 4 temps se déroule sans problème: 1er temps pendant la journée du 4, sous voile avec le moteur à régime réduit, juste pour générer suffisamment de vent apparent pour rester sur notre cap, 2ème temps sous voiles seules jusqu'au milieu de la nuit, 3ème temps avec génois roulé et moteur à haut régime face à une mer formée à l'approche de la pointe des Aigrettes, l'extrémité sud-ouest d'Haïti, et 4ème temps sous voile et moteur réduit pendant la journée du 5, tout en slalomant entre les casiers le long de la côte sud. Ce qui fait qu'on arrive tranquillement le 5 à 19h au mouillage de port Morgan dans la baie de Ferret, au nord-ouest de l'île à Vache. C'est un endroit superbe qui d'emblée nous séduit, la lumière rasante quand nous y entrons rehaussant les tons pastels des fonds, des falaises, des plages et de la végétation luxuriante.

2014Depuis la pointe des Aigrettes, nous sommes accompagnés de bois-fouillés, des bateaux étroits et rudimentaires creusés comme des pirogues dans des troncs de manguiers qui portent une immense grand-voile carrée en coton soutenue par une livarde de bambou. Ce sont les bateaux des pêcheurs qui pêchent essentiellement pour se nourrir, n'ayant pas de moyen de conservation pour une vente autre que locale, sauf à sécher le poisson, ce que certains font. Notons que tout le temps que nous longeons la côte sud, nous sommes surpris de la voir verdoyante, alors que la majorité d'Haïti souffre d'un déboisement si intense qu'on ne peut plus apercevoir qu'un sol marron-gris sans végétation; c'est sans doute parce que c'est une partie de l'île pauvre en voies d'accès, donc moins surexploitée... à confirmer. Dès que l'ancre est posée arrivent les premiers adolescents sur un reste de planche à voile ou dans une petite pirogue qui nous abordent très poliment pour nous proposer leurs services pour nettoyer la coque ou faire des provisions; après une nuit de veille nous aspirons surtout à un grand repos et leur donnons rendez-vous pour le lendemain. Ils sont suivis d'un pêcheur qui nous propose des langoustes, mais si les prix ont subi une inflation galopante depuis Cuba, il n'en est pas de même de la taille des langoustes qui sont ridiculement petites; comme il a une cigale des mers et que nous n'en avons pas mangé depuis longtemps et que de plus nous souhaitons les soutenir un peu, nous nous laissons tenter par une cigale et 2 langoustes, mais à 10$ le tout, le tiers du prix initialement demandé, ce qui satisfait les deux parties...

2014Outre la végétation verdoyante, nous sommes surpris en débarquant sur l'ile de voir des cases pimpantes construites en dur, loin de baraques de bidonvilles telles qu'on imaginait en trouver ici. Dans le même ordre d'idée, après avoir donné quelques petits boulots aux jeunes garçons (en écrivant cela, je remarque qu'aucune fille n'est venue demander un petit job...) qui sont venu à bord en solliciter, on a vite remarqué que, si leurs embarcations sont primaires et leur habillement simplissime, ils possèdent presque tous un téléphone portable en état de marche, alors même qu'il n'y pas d'électricité dans l'ile; les quelques réverbères de leur village de Caye Coq étant alimentés par des panneaux solaires intégrés. Il n'y a pas de rues bétonnées dans le village, ce qui serait inutile, vu qu'il n'y a pas non plus de véhicules. Comme aux Saintes il y a 30 ans quand on est arrivés en Guadeloupe, la majorité des déplacement et du transport se fait en bateau, à cette différence près qu'ici c'est à la voile et non au moteur. Ce qui fait que la baie et l'immense plan d'eau qui sépare l'ile du continent sont constellés de voiles, petites taches blanches sur le bleu de l'océan. Autre motif d'étonnement, non seulement ils ont Internet, mais en plus la 3G avec un débit qui nous fait pâlir d'envie. Nous en profitons pour prendre et donner quelques nouvelles, regrettant simplement que le partage de connexion du réseau données de notre téléphone ne marche pas, alors même que l'opérateur local est Digicel celui de notre abonnement.

2014Le lendemain nous partons au marché du plus gros bourg de l'île on nom étonnant de  "Madame Bernard" où se trouve également l'orphelinat pour lequel nous avons emportés pas mal de matériel scolaire, ayant été dans l'impossibilité de prendre une caisse de médicaments du fait de l'interdiction de les importer aux Etats Unis, même en transit temporaire. Nous avons entendu parler de cet orphelinat par Michel Cusenier, un ami d'Hector qui passe régulièrement en Guadeloupe pour s'y rendre sur un voilier chargé de médicaments. Il y reste la moitié de l'année à y travailler bénévolement en s'occupant des handicapés, mais il semble qu'il n'y soit pas venu ces dernières années, suscitant l'inquiétude du rare personnel quand à sa santé. J'ai souvent eu l'occasion de dire à Hector que j'étais prêt à y aller pour porter du matériel ou des médicaments; c'est maintenant chose faite, et j'espère que nous aurons l'occasion d'y retourner ensemble. La visite de l'orphelinat nous a laissé une impression de malaise: on se demande l'intérêt de laisser vivre ces enfants qui n'atteindons sans doute pas leur majorité et qui sont dans un tel état de handicap que nous n'avons pas pu déceler dans leur regard la moindre étincelle de vie... C'est une question de société qui revient périodiquement à la une de l'actualité sans qu'aucune solution valable ne soit proposée !

 

2014Pour aller au marché de Madame Bernard, c'est une marche de deux heures très agréable qui nous fait traverser 3 ou 4 autres villages, constitués essentiellement de cases en dur, bien qu'on puisse en voir quelques unes construites en gaulettes, comme c'était encore le cas il y a peu à Saint Louis de Marie Galante. Le chemin longe le bord de mer et nous fait quelques fois gravir une petite falaise, ce qui nous permet d'avoir un bon aperçu des paysages alentour. Nous sommes accompagné d'un tout jeune guide qui ne nous sert pas à grand chose, attendu qu'il n'a pas une seule fois ouvert la bouche pour nous donner une quelconque explication, mais à qui on n'a pas eu le coeur de refuser le job. Celui de Georgina, notre amie anglaise de "Shamal", plus âgé, est un peu plus loquace, surtout avec les filles que l'on croise ou qui nous doublent, et c'est par lui que nous apprenons le nom des hameaux traversés. Quant au marché lui même, ce sont essentiellement des étalages de quelques produits à même le sol: un choix de légumes restreint, quelques poules vivantes, une ou deux carcasses de porc, et toutes sortes d'objets hétéroclites qu'on s'étonne parfois de trouver ici. Le plus surprenant, c'est que les commerçants préfèrent rester en plein soleil dans la poussière, alors qu'une communauté de pays d'Amérique centrale et du sud  (Guatemala, Costa Rica, Brésil, Uruguay, Paraguay... bizarrement aucun don des USA, bien qu'ils se soient arrogés le droit de gouverner Haïti plus de 10 ans dans les années 90) leur a été construit un grand marché couvert, mais dont les stands ne leurs conviennent pas; c'est tout le problème des d'interventions qui se veulent généreuses mais oublient de vérifier l'adéquation de leurs dons au besoin.

2014Pour revenir du marché nous empruntons un des bois-fouillés, l'autobus local. C'est un véritable plaisir de voyager ainsi en contact avec la population dont les sujets de conversation vont de la bilharziose, dont l'origine est un parasite des rivières, confondue avec la filariose, dont l'origine est un moustique,  à la politique, le mandat du chanteur Marthely qui est l'actuel président arrivant bientôt à expiration, qui avait obtenu une confortable majorité mais semble avoir déçu. L'autre sujet de conversation tourne autour d'un projet d'hôtels qui ne fait pas l'unanimité (sans doute à juste titre, car nous avons déjà pu constater dans les Grenadines que ça n'apporte rien à la population locale, si ce n'est quelques emplois sous-payés de femmes de chambres ou de cantonniers); mais il semble que ce soit déjà bien engagé, car une piste d'atterrissage est déjà en cours de construction. Une fois la voile installée et la livarde en place, le bateau avance son petit bonhomme de chemin en emmenant sa douzaine de passagers à petite vitesse; comme il y a peu de vent et qu'on est au portant, on a l'impression de glisser sur l'eau. Le capitaine me fait la conversation et c'est lui qui m'informe des sujets des conversations dont j'avoue ne comprendre que la moitié, mon professeur de créole m'ayant laissé en chemin.

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Sur le mouillage où nous avons décidé de rester jusqu'au début du week-end dans l'espoir de pouvoir recevoir la visite de Bernard, notre ami haïtien de Petionville (dans les hauteurs de Port au Prince) que nous avons eu l'occasion d'héberger en Guadeloupe il y a une dizaine d'année et que nous aimerions revoir ici, nous faisons la connaissance d'autres équipages. Notamment Geneviève et Michel, des français sous pavillon belge sur "Tout est là", un Dynamic 440 sur plan Joubert, dont le nom est suffisamment évocateur pour qu'on comprenne que leur voilier est leur maison, leur véhicule et leur loisir; retraités ils ont toujours vécu sur un voilier , de l'Afrique et à St Martin, d'abord un monocoque de 34 pieds  qu'ils ont changé à la naissance de leur fille pour un catamaran qu'ils ont construit à Abidjan et perdu à St Martin lors du cyclone Luis, puis sur leur bateau actuel qu'ils ont racheté au Panama à l'état d'épave et on entièrement refait. Bien que nous soyons là depuis plusieurs jours le défilé des demandeurs de petits jobs ne cesse pas, bien qu'on ne voit plus trop quoi leur proposer  le pont étant lavé, les inoxs rénovés et la coque lustrée... on en a compté jusqu'à 31 dans une seule journée à se succéder pour demander strictement la même chose; bien qu'ils soient toujours très polis, ils ne cessent d'appeler jusqu'à ce qu'on sorte leur répondre, compromettant fortement nos velléités de sieste... Pendant ce temps les apéros et diners se succèdent sur un bord ou l'autre pour notre plus grand plaisir.

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